Le lézard de Bonnal face à la remontée du lézard des murailles

Le lézard de Bonnal a fait l’objet de suivis en 2011. En 2016, le programme les sentinelles du climat reprend le suivi de cette espèce : les mêmes transects sont parcourus tous les ans. De nouveaux transects sont proposés sur d’autres sites.

Le lézard des murailles s’installe progressivement toujours plus haut en altitude, dans des secteurs où, avant, seul le lézard de Bonnal était présent.

En 10 ans, dans le secteur d’Arrious, la limite haute de l’aire de répartition du lézard des murailles a progressé de 120 m. La limite basse de présence du lézard de Bonnal n’a pas bougé. Dans ce secteur, les deux espèces cohabitent maintenant.

Évolution de la répartition du lézard des murailles et du lézard de Bonnal entre 2011 et 2022 sur Arrious
Évolution de la répartition du lézard des murailles et du lézard de Bonnal entre 2011 et 2022 sur Arrious
Description

Sur l’image, plusieurs cartes du même site (Arrious) se succèdent et représentent chacune une année (2011, puis chaque année entre 2016 et 2022). Le fond est le même (image satellite). Sur ce fond, les observations du lézard des murailles (en vert) et du lézard de Bonnal (en rouge) sont représentées, lissées sous forme de « zone de chaleur », soit, une estimation de la présence potentielle des populations de ces espèces, basée sur l’observation réelle des individus.
On observe que depuis 2016, le lézard des murailles est présent de plus en plus haut, et en plus grand nombre, au fur et à mesure des années. Le lézard de Bonnal est observé aux mêmes altitudes tous les ans.

Ces résultats soulèvent deux questions :

  • La remontée en altitude du lézard des murailles entrainera-t-elle une compétition avec le lézard de Bonnal, pour les ressources alimentaires par exemple ?
  • Le maintien de l’aire de répartition du lézard de Bonnal, où les conditions climatiques se modifient, peut-il avoir un impact sur l’état physiologique et sanitaire du cette espèce ?

Retrouver ces résultats en vidéo ci-dessous.

Description de la vidéo

Matthieu Berroneau, herpétologue à Cistude Nature, est interviewé tout au long de la vidéo, de visu ou en voix-off.
Nous suivons Matthieu dans la montagne, à la recherche des lézards : « Là, il y en a un qui part dans les orties. » « Sur la pierre, un gros mâle. » ‘Et une femelle, là-bas. »

« On est sur le chemin du col d’Arrious en vallée d’Ossau. C’est un site où on fait plusieurs suivis dans le cadre des sentinelles du climat. Notamment parce qu’ici il y a une belle population de lézards de Bonnal, un lézard endémique des Pyrénées. Ça fait cinq ans qu’on passe trois fois par an ici et qu’on note tous les lézards qu’on
voit le long d’un transect. C’est un transect altitudinal qui commence à 1700 mètres, qui finit à 2300 mètres environ.

L’hypothèse première qu’on avait sur le lézard de Bonnal présent ici à partir de 1900 m c’est que, si les températures augmentent tous les ans, on peut imaginer que ce lézard va remonter tous les ans un petit peu en d’altitude. En fait, pour l’instant, les lézards de Bonnal ne bougent pas. Il n’y a pas beaucoup de mouvements en altitude chaque année chez ce lézard. Par contre, ce qui est assez inattendu, c’est qu’on a une autre espèce, le lézard des murailles, un lézard beaucoup plus commun dans la région qui débute d’ailleurs dès la plaine, dès 0 m d’altitude. Il peut y en avoir au bord de la mer, etc.
Il y a encore peu de temps, il était à sa limite altitudinale à environ 1900 m. Il était donc en début de transect. Après, on le voyait pas sur les sites où il y avait le lézard de Bonnal. Depuis qu’on fait le suivi, tous les ans, on en voit de plus en plus. La première année, on en a vu un. L’année d’après, trois. L’année suivante, neuf. Et après, soixante ! Ça veut dire qu’il y a une population qui s’est installée progressivement en altitude et qui est maintenant mélangée avec le lézard de Bonnal. A l’endroit même où en est assis, on a les deux espèces, alors que le lézard des murailles n’était pas présent il y a encore quatre ans.
Donc, il est là. Il n’y en a encore pas trop. On l’a vu, il y a encore plus de Bonnal que de lézard des murailles. Là, on compte un lézard des murailles pour 10 lézards de Bonnal. Mais a priori ça va augmenter progressivement. Et qui dit qu’on va pas arriver à 50/50, voire plus après. On sait pas, on va voir.
Maintenant, on se pose des questions. Est-ce que l’arrivée du lézard des murailles sur le site à lézards de Bonnal va poser problème ? Est-ce qu’il va y avoir une compétition ? Est-ce que peut-être il va apporter quelques maladies qu’il va transmettre au lézard de Bonnal Est-ce que des prédateurs du lézard des murailles vont maintenant l’accompagner et du coup s’attaquer aussi au lézard de Bonnal ? Il y a quelques hypothèses comme ça qui vont être dures à tester. Mais en tout cas, ce sont des questions qu’on se pose aujourd’hui suite à la situation sur ce site-là. »

Les apports des modèles biomimétiques

Les modèles biomimétiques ont pour but de modéliser le temps d’activité du lézard de Bonnal et son évolution selon la trajectoire de réchauffement climatique.
La modélisation issue de l’enregistrement de l’approximation des températures corporelles d’un lézard sous abri et en situation d’insolation, dans différents contextes, permet de montrer que le temps d’activité diminue quand :

  • l’amplitude thermique jour/nuit est importante (journées plus chaudes, nuits fraiches),
  • les journées sont chaudes et sèches.

Ces conditions deviendront plus fréquentes avec le changement climatique. Ceci pourrait avoir un effet négatif sur la reproduction de l’espèce.

Téléchargez les résultats Nouvelle-Aquitaine

Une première vague de résultats 2016-2021 des suivis réalisés en Nouvelle-Aquitaine a été produite. Deux versions résumées sont disponibles en cliquant sur les boutons ci-dessous.