Le programme arrive en Normandie

L'enjeu des opérations de réintroduction de Sonneur à ventre jaune en Normandie est de cibler les aires qui lui seront favorables avec le changement climatique. Photo : Mégane Skrzyniarz
L’enjeu des opérations de réintroduction de Sonneur à ventre jaune en Normandie est de cibler les aires qui lui seront favorables avec le changement climatique. © M.Skrzyniarz

Sonneur à ventre jaune, Lézard vivipare, Azuré des mouillères, Gentiane pneumonanthe… quelle place le réchauffement climatique laissera-t-il pour ces espèces en Normandie ? A quelques jours de la COP Climat et dans un contexte où les effets du phénomène sont de plus en plus perceptibles, rappelons que l’ensemble du vivant est fragilisé. Après l’Occitanie, le programme néo-aquitain « Sentinelles du climat » gagne cette année la Normandie. Il vise à mesurer l’impact de la crise climatique sur la faune et la flore, comprendre les réponses des espèces et des milieux pour être en capacité de proposer des leviers d’atténuation.

Forte de l’expérience de l’association Cistude Nature à l’initiative de la démarche depuis 2016 en Nouvelle-Aquitaine, l’Union des Centres Permanents d’Initiatives pour l’Environnement de Normandie (URCPIE) officialise la mise en œuvre du programme « Sentinelles du climat » dans la région. Sans attendre, la flore, les insectes, les amphibiens comme les reptiles feront l’objet des suivis scientifiques. Pour mesurer l’impact du changement climatique sur la biodiversité, le programme s’intéresse en effet aux espèces sensibles à ces perturbations, sur des sites préservés, équipés de stations météorologiques et répartis dans l’ensemble de la Normandie. L’analyse statistique des données naturalistes et météorologiques croisées avec les scénarios de modifications du climat dressés par le GIEC (Groupe d’experts internationaux sur le climat) permet de quantifier la dégradation des conditions locales favorables aux espèces et d’évaluer les risques de disparition de populations et les facteurs responsables : un préalable pour des recommandations d’aménagement et de gestion des milieux naturels.

Des enjeux propres à chaque espèce

Parmi les espèces qui retiennent l’attention des naturalistes, on peut lister :

  • le Sonneur à ventre jaune : l’amphibien menacé en France pourrait être climatiquement favorisé dans le nord-ouest du pays mais la disparition de ses habitats l’a conduit au bord de l’extinction en Normandie. Si le succès est au rendez-vous pour les premières opérations de réintroduction, il est primordial de cibler les aires qui lui seront le + favorables.
  • le Lézard vivipare : ce reptile étonnamment adapté aux milieux frais et humides est, de fait, particulièrement sensible aux sécheresses estivales de + en + fréquentes.
  • l’Azuré des mouillères : ce papillon dépend d’une unique plante pour se reproduire. Or, la Gentiane pneumonanthe, inféodée aux zones humides, subit elle-même l’impact du réchauffement climatique…

La mobilisation scientifique sur le sujet est telle que plusieurs structures sont d’ores et déjà engagées : le Groupe d’étude des invertébrés armoricains, le Conservatoire botanique, le Conservatoire d’espaces naturels, le GIEC normand, l’Agence normande de la biodiversité et du développement durable ou encore l’Office national des forêts. Plusieurs étapes devraient jalonner le déploiement du programme : la mise en place de stations météorologiques dans les espaces protégés concernés et le lancement des suivis dès 2023/2024 puis le déploiement des suivis de l’ensemble des espèces dans les 60 sites identifiés en 2025/2026. Une démarche qu’il sera évidemment nécessaire de poursuivre pendant plusieurs années pour regrouper suffisamment de données avant de tirer des conclusions.

Montrer la science en construction pour sensibiliser

Une des spécificités de ce programme de recherche est la place accordée à la médiation scientifique et à la sensibilisation à ces enjeux de société. Vidéos, bandes-dessinées, site internet, exposition… Cistude Nature a créé de nombreux outils depuis 7 ans pour expliquer les étapes du projet, présenter les enjeux, exposer la démarche, décrire les résultats… l’Union des Centres Permanents d’Initiatives pour l’Environnement de Normandie souhaite également garder cette approche afin de toucher les citoyens normands et faciliter la compréhension et l’appropriation de sujets qu’on ne peut plus nier, celui du changement climatique et de son impact sur la biodiversité.